La grande aventure des Français au Brésil est un des épisodes les plus extraordinaires et les plus méconnus de la Renaissance.
Rouge Brésil raconte l’histoire de deux enfants, Just et Colombe, embarqués de force dans cette expédition pour servir d’interprètes auprès des tribus indiennes. Tout est démesuré dans cette aventure. Le cadre: la baie sauvage de Rio, encore livrée aux jungles et aux Indiens cannibales. Les personnages – et d’abord le chevalier de Villegagnon, chef de cette expédition, nostalgique des croisades, pétri de culture antique, précurseur de Cyrano ou de d’Artagnan. Les événements: le huis clos dramatique de cette France des Tropiques est une répétition générale, avec dix ans d’avance, des guerres de religion.
Prix Goncourt 2001
Le thème central de Rouge Brésil est la rencontre avec l’Autre. Les Européens rencontrent les natifs du Brésil. Les catholiques s’opposent aux croyances protestantes. Just et Colombe se découvrent eux-mêmes, en tant qu’homme et femme. On suit les deux protagonistes à travers un voyage initiatique qui part d’Italie pour les mener en France antarctique, à la rencontre de la chevalerie du XVIème siècle, des Tupis et d’autres peuples indigènes. Just est pris sous l’aile du commandant Villegagnon qui lui apprend à manier les armes. Colombe est davantage attirée par la pureté et la simplicité de la vie sauvage. Jean-Christophe Rufin met également en scène des problèmes religieux qui divisent la communauté que dirige Villegagnon. Les protestants aux idées fraîches affrontent les catholiques convaincus de longue date et les dissensions au sein des colons affaiblissent la puissance de leur hégémonie. L’enjeu religieux côtoie le politique et l’on ne sait pas très bien lequel sert d’excuse à l’autre : répandre la “vraie” foi ou prendre le territoire de l’autre. A la fin de son roman, l’auteur explique bien que les faits qu’il a relatés sont avérés et que les personnages ont vraiment existé. Il s’est appuyé sur des écrits de l’époque, à l’image des Essais de Montaigne qui traitent notamment du cannibalisme, thème récurrent du roman. Ces sources permettent une excellente reconstitution de l’époque, à la fois sociale, religieuse et psychologique pour comprendre les agissements des personnages.
L’écriture est magnifique, digne des plus grands tels que Maurice Druon et Henri Troyat (dont Jean-Christophe Rufin est le successeur à l’Académie Française).
Un auteur à lire sans retenue !