Snobs, Julian Fellowes

Quand Edith Lavery, jeune roturière pleine d’ambition, conquiert le cœur du comte Charles Broughton, l’un des célibataires les plus convoités de l’aristocratie anglaise, elle et sa mère ne se tiennent plus de joie. Une fois devenue comtesse, Edith ne tarde pas à se lasser des interminables parties de chasse et des thés de bienfaisance chapeautés par sa terrible belle-mère, Googie. C’est alors qu’elle tombe dans les bras de Simon Russel, un acteur de seconde zone, s’attirant ainsi les foudres du monde qu’elle a tant eu de mal à intégrer… D’une intrigue digne de Jane Austen, Julian Fellowes tire une satire réjouissante des mœurs de l’aristocratie anglaise.

 

Snobs n’est pas une agréable surprise, c’est une lecture surprenante. Jusqu’à la fin du livre on s’attend à ce que quelque chose éveille davantage notre intérêt que cette lutte des classes en interne, mais rien n’y fait.

Julian Fellowes décrit certes une aristocratie anglaise vieillissante qui campe sur ses acquis mais l’intrigue ne décolle pas. La jeune Edith, timide ambitieuse, parvient à épouser Charles, comte Broughton, et se met ainsi à dos toute cette aristocratie dont elle ne faisait pas partie avant son mariage. Sa belle-mère accepte difficilement que son fils ait épousé une jeune femme d’une condition inférieure, mais finalement, le mariage s’impose dans ce cercle fermé. Et puis Edith s’ennuie et la vie qu’elle s’imaginait, nourrie par ses lectures de jeunesse, se trouve être morne et décevante. Elle s’attendait à des bals à la cour et se retrouve à des galas de charité et à veiller sur un domaine qu’elle n’apprécie pas. Par dessus tout, Edith se lasse de son mari. Elle prend un amant, un jeune acteur (peut-être) en devenir et découvre alors un nouveau monde où elle s’épanouit. Edith est alors rejetée par cette aristocratie qu’elle avait tant eu de mal à intégrer mais au début, elle s’en fiche. Puis elle revient vers son époux, pour une raison que je garde secrète, c’est à peu près le seul rebondissement du roman (dont on peut néanmoins se douter et qu’on voit venir de trèèès loin). Et rebelote, elle doit faire face à ce monde qui n’est pas le sien et faire fi des rumeurs et des regards de travers.

Bref, que retenir ? J’en ai lu des romans où il se ne passait rien mais où on ne s’ennuyait pas. Ici, J. Fellowes ne fait que répéter les mêmes choses pendant 400 pages : Edith n’est pas du même monde, la belle-mère est snob, on n’accepte pas Edith parce qu’elle est d’une classe inférieure, etc. Au début, on se dit que c’est encore relativement subtil, et puis on est carrément scandalisé quand on se retrouve avec un dialogue entre le narrateur et la belle-mère qui soutient qu’elle « n’est pas snob, mais quand même, Edith est d’une classe sociale inférieure ». A croire que Julian Fellowes a dû se dire « je ne sais pas si je fais bien passer le message  » ! Alors que le lecteur a compris depuis longtemps que l’enjeu du livre tourne autour de ces différences sociales. Pour moi le roman devient, à ce moment, grossier et on insulte presque le lecteur, trop idiot sûrement pour comprendre subtilement l’idée qu’on fait passer depuis le début du livre.

Et puis, à force de voir les personnages à travers l’œil de quelqu’un qui les observe et les passe au crible pour nous expliquer ce qu’on doit comprendre dans les situations, je n’ai pas réussi à m’attacher à Edith ni à Lady Uckflied. Charles, peut-être sur la fin, devient le plus humain de tous et le moins obsédé par cette lutte des classes, mais je me l’imagine apathique et sans réelle personnalité.

Deuxième chose : la quatrième de couverture compare le roman à une œuvre de Jane Austen. NON ! Jane Austen est fine dans ses descriptions et n’évoque que très rarement cet enjeu de classe : tout est sous-entendu. Exemple d’Orgueil et Préjugés : l’entourage de Darcy ne souhaite pas le voir épouser Elizabeth Bennett car elle est d’un rang inférieur, mais les choses sont dites différemment et passent notamment par l’attitude grotesque de sa mère que personne ne veut voir devenir la belle-mère de Darcy. Certes, c’est une mésalliance du point de vue de Darcy, mais jamais il n’est dit aussi explicitement dans un Jane Austen « vous ne pouvez l’épouser parce qu’elle vous est inférieure », hormis par le personnage de Lady Catherine, la tante de Darcy. Bref, aucune comparaison possible avec Jane Austen qui se moque de ses personnages avec une ironie anglaise délicieuse et subtile, ce qui manque à J. Fellowes.

Troisième et dernière chose, le narrateur. On comprend mal qui il est et pourquoi tout le monde se l’attache ainsi. Il ne semble être qu’acteur, bien que d’une extraction noble qu’il ne cultive pas et son amitié avec Edith est crédible. Mais c’est avec la belle-mère qu’elle l’est moins. Cette vieille dame snob qui n’accepte pas Edith se confie ouvertement à ce jeune homme qui n’est rien pour elle et qui ne fait pas partie du même milieu. Etrange…

En conclusion, je dirai que les maisons d’édition nous ont encore survendu un ouvrage qui ne le méritait pas. Julian Fellowes a sans doute été publié grâce à son nom et le bandeau « par l’auteur de Downton Abbey » en première de couverture le prouve bien. L’écriture ne permet visiblement pas à Julian Fellowes de briller (à mes yeux, en tout cas), mais je reconnais volontiers qu’il est indéniablement plus talentueux à l’écran, avec pour preuve les très réussis Gosford Park et Downton Abbey dont on ne souviendra longtemps.

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