« On est volontiers persuadé d’avoir lu beaucoup de choses à propos de l’holocauste, on est convaincu d’en savoir au moins autant. Et, convenons-en avec une sincérité égale au sentiment de la honte, quelquefois, devant l’accumulation, on a envie de crier grâce. C’est que l’on n’a pas encore entendu Levi analyser la nature complexe de l’état du malheur. Peu l’ont prouvé aussi bien que Levi, qui a l’air de nous retenir par les basques au bord du menaçant oubli : si la littérature n’est pas écrite pour rappeler les morts aux vivants, elle n’est que futilité. » Angelo Rinaldi
Primo Levi (1919-1987) est rescapé italien du camp d’Auschwitz-Monowitz. Il raconte son histoire avec des mots simples, parfois crus, qui nous font comprendre toute l’atrocité des camps nazis. La dureté du travail, la méchanceté des gardiens mais aussi celle de ces co-détenus et cette affirmation que l’on peut aussi tourner en question : Si c’est un homme. Est-ce un homme que celui qui impose un tel enfer à un autre ? Est-ce encore un homme que celui qui subit cet enfer ? Primo Levi explique que les réactions tendent plus vers l’animalité que vers l’humanité. A être enfermé, à avoir peur, à souffrir d’un travail trop dur et de conditions de détention trop pénibles, peut-on encore survivre en homme ? Ou (re)devient-on un animal pour se protéger ?
La lecture de Si c’est un homme est loin d’être facile et je la dirais même éprouvante. Savoir que l’auteur a vécu tout ce qu’il raconte est une chose. Mais il faut aussi avoir conscience que bien souvent les mots ne parviennent pas à exprimer un sentiment aussi fidèlement qu’il le faudrait. Aucun lecteur n’arrivera jamais à ressentir la solitude et la souffrance par lesquelles est passé Primo Levi. Je ne pouvais m’empêcher de me demander comment un homme avait pu survivre dans de telles conditions : est-il plus fort que les autres qui n’en sont pas revenus ? A-t-il eu plus de chance ? La vie tient-elle finalement au hasard ?
Si c’est un homme nous plonge dans un enfer qui a existé et, pour en avoir toujours conscience, chacun d’entre nous devrait lire ce livre au moins une fois dans sa vie comme une leçon du passé et des atrocités des hommes. Ce n’est que par le savoir et la connaissance que l’homme, en apprenant de ses erreurs, ne les reproduira pas. (Enfin, espérons-le !)